http://www.classmates.com/directory/public/memberprofile/list.htm?regId=8692739621Judo International: Voix du Japon par Gotaro Ogawa

Peut-on espérer un renouveau du judo nippon

 Plus de deux mois se sont passés depuis que la Fédération Japonaise de Judo (FJJ) a renouvelé entièrement l’équipe dirigeante de son organisation à la tête de laquelle s’asseoit maintenant un homme d’affaire de grande envergure : Shoji MUNEOKA. Evènement inédit, c’est la première fois que le Président de la Fédération est nommé de l’extérieur du cercle de judo traditionnellement très fermé. M. Muneoka est le PDG d’une grande compagnie internationale de sidérurgie: le Nippon Steel & Sumitomo Metal. Ce changement est très favorable pour la FJJ, car Muneoka, en tant qu’industriel d’expérience, est un homme doté d’une vision internationale et d’une capacité de gestion de grande organisation. Pas médaillé, comme l’ancien Président Uemura, il est tout de même un bon judoka ;  ancien capitaine du Judo Club de l’Université de Tokyo.
En ce début du mois de novembre, quelques pas ont été faits dans la voie de la réforme mais on ne voit pas encore clairement dans quelle direction s’oriente le nouveau chef de file. Il serait opportun, à ce stade, de faire une analyse sur des changements qui pourraient avoir lieu et sur ce qui faudrait faire.
 
Une ouverture qui fera date
A mon avis, parmi le mal le plus grave de l’«ancien régime» de M. Uemura était le charactère fermé de l’organisation. Le groupe dirigeant était composé d’un petit nombre d’amis de Monsieur Uemura, tous bons judokas autrefois mais peu sensibles à l’ère du changement. Au sein du Conseil d’Administration ne se trouvait aucun membre féminin, ni aucune personnalité en dehors du monde du judo. Ce qui rend difficile, par exemple, d’administrer d’une manière appropriée la série de scandales qui se sont succédé depuis la fin de l’année dernière telle que la violence exercée par l’entraîneur-en-chef de l’équipe nationale féminine sur ses élèves, l’utilsation inappropriée de subventions pour les entraîneurs et athlètes, etc. Face aux critiques sévères de l’opinion publique ainsi qu’aux mises en demeure répétées de l’organisme d’Etat chargé de surveiller les organisations au but publique, M. Uemura et son équipe se trouvaient ainsi obligés de quitter la direction.
Comparer à l’«ancien régime », l’équipe de M. Muneoka a une ouverture qui fait époque. Il a nommé ( directeur du management ) un ancien fonctionnaire de la police nationale comme ajoint, c’est un ancien judoka aussi ;  mais hors du « cercle » de judo. Le nouveau président sera assisté par Yasuhiro Yamashita, nommé vice-président. Ce grand champion, icone mondiale, a, jusqu’ici, été mis à l’écart du centre du pouvoir. Mais désormais Yamashita va se charger d’assister le nouveau président tout en coordonant les besoins gestionnaires réformistes et les intérêts des anciens du « cercle ». Au sein du nouveau Conseil d’administration figurent des membres féminins, ce qui est aussi nouveau ici. Yoko Tanabe, Noriko Kitada, Ryoko Tani, toutes médaillées olympiques siègent désormais dans l’organisation. Kaori Yamaguchi, médaillée également, mais connue comme réformiste inébranlable, se joint, elle aussi, au Conseil, en qualité d’inspectrice. Quelques intellectuels non-judokas y ont été nommés aussi. En un mot, la nouvelle structure de gestion montre une ouverture de l’organisation ce qui contraste avec le régime précédent dominé par des ancients combattants très consevateurs. Dans sa conférence de presse après la nomination, M. Muneoka a exprimé sa forte détermination à exécuter des réformes nécessaires et son adhésion aux principes du Maître Jigoro Kano. L’opinion publique accueille favorablement la nouvelle équipe de M. Muneoka.

Où se situe le judo japonais ?
Cela s’annonce bien et, à ce stade intial, donne l’espoir d’un renouveau du judo japonais. Mais ce n’est qu’un tout a fait le commencement de l’exercice de l’équipe de Muneoka. Or les tâches auxquelles doit faire face la FJJ sont bien nombreuses, variées et complexes.
D’abord la performance de nos combattants aux Jeux de Londres a été fort décevante. Et à ce jour, ils ne se sont pas encore rétablits. Sans doute la méthode d’entraînement devrait être réexaminée. Un autre problème important, c’est que la popularité du judo est en baisse constante durant cette décennie; étant donné que la jeune génération a tendance à penser que le judo est un exercice physiquement très dur. Les scandales récents ont écarté peut-être davantage l’intérêt de la jeunesse au judo. Contrairement à la situation en France, les valeurs du judo en tant qu’instrument d’éducation mentale et physique sont mal connues ici au Japon. Nous avons donc des problèmes tant au niveau des athlètes nationaux qu’au niveau populaire. A cela s’ajoute une contrainte organisationnelle: la Fédération n’est pas dotée de personnel suffisamment puissant. Un nombre important d’experts devront donc être introduits de l’extérieur pour mener à bien des réformes nécessaires.

Qu’est-ce qu’il faut faire maintenant ?
J’ai eu une série de discussions pendant ces derniers mois avec des intellectuels, des hommes de culture, des judokas et d’autres personnalités qui s’intéressent aux affaires de judo.Cela a abouti à une déclaration sur les points des efforts de réformes. J’en résume des points principaux.
1. Rassembler autour du nouveau président des experts et des personalitées masculines
et féminines de compétences appelés de l’intérieur et de l’extérieur du cercle de judo.
Renforcer le personnel notamment aux sections de stratégie, de finances, d’affaires internationales et de la publicité.
2. Le Conseil d’administration étant reconstitué, réaménager maintenant la composition du Conseil de direction afin que celui-ci puisse diriger véritablement le Conseil d’administration de point de vue globale. Dans cet objectif, réaliser les débats libres sans considération relatives à l’ancienneté, sexe ou appartenance.
3. Réexaminer la relation entre la FJJ et le Kodokan. Jusqu’ici les deux oraganisations ont été dirigées par la même personne. Il en a résulté que les fonctions de chacune des organisations étaient ambiguëes. Il faut redéfinir les rôles des deux institutions de manière mutuellement complémentaires et bénéfiques. En même temps, améliorer le système d’octroi des Dan qui a fait l’object de controverses pendant des années.
4. Renforcer l’éducation sur les valeurs du judo. Les arts martiaux sont devenus un sujet obligatoire au collège mais il existe un image du judo comme dangereux. Le judo est pratiqué dans le monde entier et a obtenu une véritable universalité car la pratique apporte non seulement un développement physique mais aussi des vertus comme la discipline mentale, la patience, le respect, la modestie, etc. Ceci doit être connu davantage par le public japonais.
5. S’engager activement dans les affaires internartionales, notamment concernant les changements de règles, gestion des tournois internationaux, coordination et cooperation avec la FIJ et des fédérations nationales. Le Japon est le pays d’origine du judo et possède une philosphie, des connaissances et un niveau technique très élevé. Le Japon doit se faire entendre pour contribuer davantage au bon développement du judo dans le monde.  

Jeux Olympiques en 2020
Le chemin de réformes doit être long et dur. Il est nécessaire de préparer des stratégies et des plans. Et là-dessus je mise sur l’esprit d’ouverture et la détermination du nouveau président Muneoka. Dans cette optique la tenue des Jeux olympiques à Tokyo en 2020 présente un cadre excellent pour nos efforts. Pourquoi ne pas établir une grande stratégie et des plans quinquennaux sur l’amélioration de la performance de nos athlèthes, renforcement de l’organisation, ainsi que la promotion du judo à véritable niveau populaire.

                            (le 5 novembre, 2013)